
AVIS D'EXPERT | Alexandre Boulegue | Publié le 01 Juin 2021
CommerceServices aux ménagesSantéLe marché de l’optique est retombé en 2020 à 6,5 milliards d’euros (-10,4%), soit son niveau de 2015, sous l’effet de la crise sanitaire et des périodes de confinement. Mais alors que les ventes de solaires ont plongé de 22%, en lien avec la baisse de la fréquentation touristique, l’optique médicale a mieux résisté (-9,4%). Le marché devrait rebondir de 8% en 2021 mais il ne dépassera pas avant 2023 son niveau d’avant-crise (7,3 milliards d’euros en 2019), selon le scénario central . La réforme du 100% Santé a en partie rempli son rôle en favorisant une baisse des restes à charge concentrée sur les besoins essentiels en optique. Dans un contexte pandémique, l’utilisation accrue des écrans va encourager de nouveaux besoins d’équipement. Par ailleurs, les prestations hors les murs (click & collect, prise de rendez-vous en ligne…) mises en place chez un nombre croissant d’enseignes permettront de contourner les freins à la mobilité des clientèles et de mieux adresser certains publics (personnes âgées et dépendantes, salariés sur site et publics urbains dans une moindre mesure). L’audioprothèse devrait également constituer un relais de diversification. L’instauration en janvier 2021 d’offres d’aides auditives sans reste à charge dans le cadre du 100% Santé a fait exploser le marché (ventes en hausse de 40% en janvier et février par rapport à la même période de 2020). En revanche, la diffusion des usages en ligne n’aura que des impacts limités en matière de pressions tarifaires. L’association du commerce en ligne d’optique à un réseau physique restera en effet un facteur clé de réussite. Dit autrement, la menace de pure players (sites spécialisés ou Cdiscount…) semble encore limitée pour l’instant. L’appétence pour l’optique en ligne se manifeste pour l’essentiel autour des lentilles (plus de 26% des consommateurs) et des solaires (plus de 20%). Seuls 7 % des Français affichent une préférence pour l’achat en ligne d’optique. La crise sanitaire a en revanche conforté l’importance des stratégies digitales dans la distribution d’optique. Cette digitalisation des parcours clients déplace et revisite la compétition autour de la conquête de flux sur les canaux digitaux.
Globalement, la digitalisation des parcours fait le jeu des enseignes au détriment des opticiens indépendants. La puissance d’une enseigne est en effet déterminante en matière de visibilité. Pour autant, quand certaines enseignes ont rapidement pris le virage de l’omnicanalité, d’autres accusent un certain retard. Les niveaux d’audience en ligne semblent ainsi confirmer le retard des enseignes coopératives. La percée des parcours digitaux constitue également une aubaine pour les nouveaux entrants en général et les DNVB (Digital Native Vertical Brands), comme par exemple Jimmy Fairly ou Polette, en particulier. Pour ces dernières, la captation de flux et l’expérience client en ligne sont des axes majeurs constitutifs. Suite à son rachat de GrandVision, EssilorLuxottica fait sa véritable entrée dans la distribution d’optique dans l’Hexagone. Et le leader mondial de la fabrication et de la distribution pourrait bien creuser l’écart avec des usages mobile first. Les grandes surfaces alimentaires sont également susceptibles de dégager des synergies au profit de l’optique en ligne grâce à leur expérience cumulée dans le e-commerce alimentaire.
Si le 100% Santé a en partie rempli son rôle, il souligne également les limites de dispositifs d’amélioration d’accès aux soins basés sur les prix et les niveaux de prise en charge, sans régler les difficultés à obtenir des prescriptions ou à la mobilité des patients mais aussi la désertification médicale…). Un phénomène aggravé par la crise sanitaire en raison des restrictions de déplacement. Désormais, la lutte concurrentielle se joue sur le terrain du pilotage global des parcours de soins visuels à l’échelle de l’ensemble de la filière. Concernant la télémédecine et l’optique hors les murs, les opticiens seront susceptibles de tirer parti de ces nouveaux parcours sur la base de prestations et outils élargis, sous réserve d’une nouvelle répartition des tâches avec les ophtalmologistes et orthoptistes. De leur côté, les plateformes d’OCAM (organismes complémentaires d’assurance maladie) ont vocation à orienter les parcours de soins des patients pour que ces derniers bénéficient de biens et prestations au meilleur rapport qualité-prix et pour maîtriser les coûts des remboursements. En clair, la bataille entre opticiens et OCAM monte d’un cran pour assurer ce rôle de pilotage (tiers payant, accès aux données, organisation de la télémédecine…). Pourtant, leurs intérêts convergent dans une certaine mesure autour de nouvelles formes de coopération. C’est ce qu’illustre le partenariat entre Optical Center et Itelis (optique en entreprise).
Cette refonte des parcours clients et des parcours de santé visuelle ouvre à l’évidence la voie à de nouvelles logiques de plateformes dans la distribution d’optique. A ce titre, les opticiens indépendants - en quête de visibilité en ligne – seront la principale porte d’entrée potentielle pour ces nouveaux intermédiaires qui auront à cœur d’agréger les nouveaux modes de mise en relation à l’échelle de l’ensemble du marché. La télé-ophtalmologie pourrait bien être le point de bascule le plus conséquent, à terme. Déjà ont émergé des initiatives de plateformes autour de solutions agréées de click & collect (Evioo) ou de l’optique à domicile (Doctocare). Portées par des acteurs aux moyens restreints, ces initiatives ont pour l’instant eu un impact limité. Si Doctolib devait entrer dans la danse, la donne pourrait à l’évidence changer. Certaines grandes enseignes peuvent néanmoins encore contrecarrer ces logiques d’intermédiation grâce à la puissance d’attraction de leur marque. En réalité, les forces relatives des opérateurs reposeront à l’avenir sur la maîtrise et l’exploitation des données clients. Cela passe bien sûr par des liens plus aboutis avec des acteurs innovants (start-up, institutionnels…) dans des logiques d’écosystèmes créatifs. Et là, EssilorLuxottica pourrait bien faire valoir sa différence face aux enseignes traditionnelles. A condition d’être en capacité de construire et de préserver la confiance des clients sur l’utilisation des données.
Les stratégies pour stimuler la croissance des enseignes et des centrales d’achat
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