AVIS D'EXPERT | Flavien Vottero | Publié le 28 Juin 2021
Médias et communicationLes grandes manœuvres ne font que commencer dans les médias numériques (1) de l’Hexagone. La prochaine fusion de TF1 et M6, qui doit encore obtenir le feu vert de l’Autorité de la concurrence, n’est en effet que le coup d’envoi d’un mouvement de consolidation qui devrait monter en puissance ces prochains mois face au nouveau paradigme publicitaire et au phénomène de plateformisation. D’un côté, le confinement de la population et les restrictions sanitaires ont entrainé une forte augmentation de la consommation des médias numériques et des abonnements. Mais les désabonnements vont se multiplier à l’avenir. Les Français privilégieront en effet les divertissements délaissés pendant la crise (cinéma, théâtre…) au détriment entre autres des plateformes de VàDA (vidéo à la demande par abonnement) et de streaming audio. De l’autre, les annonceurs ont sabré dans leurs dépenses de communication pour préserver leur trésorerie. Ils devraient toutefois relancer leurs investissements publicitaires en 2021 et 2022 à la faveur d’un contexte macro-économique plus favorable. Sans oublier que la fin des cookies tiers imposée par Google en 2022 bridera la croissance des revenus publicitaires des médias numériques. Résultat : un nouveau paradigme publicitaire se dessine. Dans le même temps, la délinéarisation des usages va s’accélérer. Ainsi, la consommation de plateformes de replay gratuites (myTF1, France.tv et 6play) et de streaming vidéo (YouTube) va exploser, générant près de 700 millions d’euros de recettes publicitaires en 2024. En revanche, le parc d’abonnés à un service de streaming musical plafonnera autour de 10,5 millions d’utilisateurs d’ici 2024. Au final, le marché des médias numériques pèsera 9,2 milliards d’euros en 2024 (6,8 milliards en 2020 dont 4 milliards issus des abonnements et 2,8milliards de la publicité).
Le numérique a fait sauter la plupart des barrières à l’entrée dans les médias. Les frontières sont désormais de plus en plus poreuses entre télévision, presse et radio sous l’effet de la diversification accélérée des différents acteurs. Et la plateformisation du web autour des réseaux sociaux (Facebook, Snapchat, etc.) et des big tech (Google et Apple) bouleverse la place des médias traditionnels. S’ils contrôlent encore l’aval de la chaîne de valeur, leur exposition en ligne dépend aujourd’hui, pour la plupart, d’accords de distribution qui les rendent tributaires d’écosystèmes technologiques américains (Android, iOS…). Le géant Facebook occupe la première place du marché français des médias numériques (22% de parts de marché en 2020), suivi du leader mondial de la VàDA, Netflix (14% du marché tricolore), et de Vivendi (plus de 12% via Canal+, Cnews ou encore Dailymotion entre autres). Altice, le groupe TF1 et des pure players comme Webedia ne sont pas non plus en reste. En termes de recettes publicitaires, le groupe Facebook (via Facebook et Instagram) fait la course en tête avec 1,2 milliard d’euros générés dans l’Hexagone en 2020, d’après les estimations de Xerfi Precepta. L’opérateur télécoms tricolore Altice arrive loin derrière avec seulement 330 millions d’euros de revenus publicitaires. Mais les jeux ne sont pas encore faits. L’audience est en effet au centre de la bataille concurrentielle. Ce basculement dans l’économie de l’attention est indissociable d’un univers numérique dans lequel la diffusion est délinéarisée et la consommation de plus en plus fragmentée. Les consommateurs se retrouvent face à une offre foisonnante de contenus qui leur impose d’arbitrer constamment selon l’écran à disposition, le lieu et le moment de consommation. Si Facebook est le premier média en ligne en termes d’audience (45 millions de visiteurs uniques en février 2021), d’autres médias en ligne ont vu leur audience littéralement s’envoler depuis 2019, à l’image de Netflix (+98%), TF1 (+85%) ou Snapchat (+72%).
Aujourd’hui, trois modèles de revenus dominent avec chacun ses avantages et ses inconvénients. Les « gratuits » doivent estimer le caractère intrusif de la publicité dans un contexte déflationniste et publiphobe. Les « freemium » doivent, eux, arbitrer entre fonctionnalités gratuites et attractivité des offres payantes tandis que les « payants » doivent concilier attractivité tarifaire et éditoriale dans un contexte de renchérissement des coûts où les best practices s’imposent le plus souvent à eux. Au-delà, les médias numériques se heurtent à la montée en puissance de nouveaux divertissements qui s’accaparent le temps de loisirs, et en particulier les jeux vidéo. En léger recul, la pratique du piratage (entre autres pour les événements sportifs) – qui reste ancrée chez 30% des internautes – représente elle un manque à gagner de près de un milliard d’euros pour le secteur.
Pour maximiser leur audience, les éditeurs de médias numériques adoptent des stratégies d’hyperdistribution au risque de dégrader leurs revenus par utilisateur (les intermédiaires captant une partie de la valeur). Ils cherchent également à se différencier à travers un positionnement fort pour aider l’internaute à se repérer dans un environnement d’hyperchoix. Cette différenciation par le contenu est un outil très prisé des plateformes qui se livrent une guerre d’exclusivités. Remonter la filière publicitaire pour renforcer leurs activités en amont, limiter leur dépendance aux intermédiaires et ainsi rééquilibrer les rapports de forces avec les annonceurs est également une voie explorée par les éditeurs. Les « freemium » peaufinent eux leur stratégie de monétisation de contenus et de conversion au payant (register wall …) pour accroître leur parc d’abonnés payants, lisser leurs revenus et réduire leur dépendance à la publicité. Enfin, le lancement de nouveaux services (plateformes SVOD, services de podcasts…) est aussi une voie empruntée.
(1) Le périmètre retenu pour les médias numériques sont les sites web et applications des médias traditionnels, les pure players comme les numeriques.fr ou mediapart par exemple, les réseaux sociaux tels que Facebook et Twitter, les plateformes de diffusion de contenus à l’image de Netflix, Spotify ou Cafeyn.co. La vente à l’acte de films ou de morceaux de musique a été exclue du périmètre, étant entendu que les moteurs de recherche, les sites de services et d’e-commerce ne sont pas des médias numériques.
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