Le marché du fast-food au bord de la saturation ?

Le dynamisme du marché du fast food ne se dément pas. Entre 2013 et 2024, il a plus que doublé pour atteindre près de 39 milliards d’euros. Il faut dire que les moteurs sont nombreux : hausse structurelle du budget alimentaire des ménages dédié à la restauration, dynamisme des déplacements touristiques en France, défragmentation de la pause-déjeuner, etc. D’autant que les pressions inflationnistes qui ont pesé sur le portefeuille des ménages ces dernières années ont aussi favorisé le recours aux fast-food, à l’image prix attractive au détriment de la restauration dite « à table ».

Portées par une conjoncture très favorable, les chaînes de fast food poursuivent logiquement leur expansion en France. Le nombre d’établissements de restauration rapide s’est ainsi envolé de plus de 90% entre 2010 et 2023, représentant près de 23 500 restaurants supplémentaires sur un marché qui en compte aujourd’hui près de 50 000. Et les ouvertures vont encore se poursuivre alors que de nouveaux concepts sont lancés chaque année et que les enseignes en place affichent toujours de fortes ambitions de croissance. Mais cet essor accéléré est préoccupant alors que le marché commence à montrer des signes de faiblesse. C’est particulièrement le cas en centre-ville où les deux tiers des établissements sont implantés.

 

Boulangeries et grande distribution cherchent à gagner des parts d’estomac sur la pause-déjeuner

Les boulangeries et acteurs de la grande distribution se montrent offensifs pour devenir incontournables sur le marché de la pause-déjeuner. Plusieurs facteurs les incitent à s’orienter dans cette stratégie : des marges plus élevées sur les ventes de snacking, mais surtout la volonté d’accroître le trafic en magasin. Ces acteurs peuvent en outre faire valoir des atouts de taille pour se positionner ce marché. Déjà, ils peuvent compter sur leur maillage territorial particulièrement dense. Les groupes de la grande distribution alimentaire sont ainsi à la tête d’un réseau de plus de 15 000 supérettes et épiceries au sein des grandes agglomérations et des centres-bourgs. Et les boulangeries regroupent, quant à elles, un parc de plus de 26 000 commerces, sans compter les terminaux de cuisson.

Après avoir élargi leur offre de petite restauration et investi les abords des villes, les enseignes de boulangerie s’attaquent aujourd’hui au cœur des grandes agglomérations, zones de prédilection des chaînes de restauration rapide. Elles développent des concepts de coffee shop tels que Marie Blachère Café, Ange Coffee, Paul le Café et Café Feuillette qui vont leur ouvrir de nouvelles perspectives non seulement en centre-ville, mais également dans les centres commerciaux et les zones de transit comme les gares, aéroports et aires d’autoroutes. Compétitives avec leurs formules déjeuner à 7 euros en moyenne, les boulangeries représentent une menace constante pour les fast food.

Dans la grande distribution, les offensives sur la pause-déjeuner se concrétisent principalement par l’élargissement du nombre de références présentes dans les rayons, la multiplication de kiosques de produits prêt-à-consommer et la création d’espaces de restauration dans les magasins. Dans quelques cas plus rares, des concepts dédiés à la restauration rapide sont lancés, comme Carrefour Bon App !.

Collaboratrice de Xerfi depuis 1998 et directeur d'études depuis 2005, Delphine David est experte sur les sujets liés à la distribution et au e-commerce. Elle est titulaire d’un master en économie et politique de l’énergie de l’Institut National des Sciences et Techniques Nucléaire CEA qui dépend de l’Université Paris X-Nanterre.